Le 23 juin 2016, une courte majorité de Britanniques (51,9 %) décidait de voter en faveur du retrait du Royaume-Uni de l’Union Européenne. Près de quatre ans de négociations plus tard, après plusieurs reports et une période de transition d’un peu moins d’un an, cette décision est enfin effective depuis le 31 décembre 2020 minuit, heure de Bruxelles.
Les conséquences de cette décision seront multiples, parfois imprévisibles, et s’étaleront sans doute sur de nombreuses années. Mais celle-ci a également réveillé un ancien débat : celui d’une langue commune européenne, et donc celui de la place de l’anglais au sein de l’UE.
En effet, plus de 90 % des documents du Parlement, du Conseil, de la Commission et de la plupart des institutions européennes privilégient la langue de Shakespeare. Certaines voix se sont donc élevées ces derniers mois pour que l’on mette un terme à l’hégémonie de l’anglais comme langue de travail de l’Union Européenne post-Brexit. Mais toute langue véhiculaire qu’elle soit, l’anglais n’a pourtant jamais été la langue officielle de l’UE, qui en dénombre en réalité 24, celles de ses États membres. En théorie, la sortie du Royaume-Uni ne change donc rien à cette réalité.
En pratique, il est vrai que si, pré-Brexit, l’anglais détenait bien le titre de la langue la plus parlée par les ressortissants européens (38 %), seuls deux pays la comptent aujourd’hui comme langue officielle, Malte et l’Irlande, ce qui représente à peine plus d’1 % de la population de l’UE. Cette primauté peut-elle donc perdurer ? Un revirement brutal consistant à purement et simplement exclure l’anglais des institutions européennes semble peu probable, et pas moins souhaitable ! Cela adresserait un message d’hostilité et d’antagonisme, et supposerait bien des chamboulements dont nous n’avons pas besoin en cette période de crise. Il serait plus sage d’écouter les mots du philosophe et essayiste italien Umberto Eco : « La langue de l’Europe, c’est la traduction ». Après tout, la devise européenne intégrée au Traité de Rome en 2004, « In varietate concordia » (Unie dans la diversité) nous rappelle toute la richesse de l’Europe multilingue et multiculturelle.